D’aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours voulu devenir maman ; une maman comme la mienne, douce, aimante, prête à tout pour son enfant. Je me rappelle que j’aimais la regarder allaiter ma sœur et que je trouvais ça beau. C’est depuis tout ce temps, depuis toujours même, que je suis persuadée que je suis née pour être maman et allaiter mon enfant. 


Il y a un an et des poussières, j’ai eu la peur de ma vie, une peur « bleue », comme on dit : j’ai perdu mes eaux à 28,4 semaines de grossesse. Un pipi, qui s’est avéré être long, trop long, anormalement long. J’ai su tout de suite que je devais me rendre à l’hôpital au plus vite. J’ai toujours été une fille positive, pourquoi verrais-je le mauvais côté quand on peut voir le bon ? Ben, cette fois-là, même le test du p’tit papier s’est avéré positif, mais dans le mauvais sens, si vous voyez ce que je veux dire… C’était bel et bien du liquide amniotique. Mais comment était-ce possible ? J’avais eu, jusque-là, une grossesse parfaite : je mangeais bien, je dormais bien, je faisais du yoga. Alors, pourquoi moi ? À ce moment, on m’informe que je suis considérée comme ayant une grossesse à risque et que je dois être transférée d’urgence dans un hôpital à Montréal, où ils prennent en charge les bébés extrêmement prématurés. Je suis donc montée en ambulance. Je jasais avec les ambulanciers tout le long du trajet. Je me sentais bien, mais j’étais peut-être aussi dans l’évitement, afin de ne pas trop penser à ce qui allait arriver, nous arriver. Finalement, lorsque je suis arrivée là-bas, hop dans la salle d’accouchement. Environ 4-5 spécialistes sont autour de moi. Je reçois des piqûres dans les founes pour accélérer la maturation des poumons de bébé Léo si jamais il vient au monde dans les prochaines heures. On m’observe bien là où il faut, puis, rien, aucun travail, aucune contraction, nada. On me dit que j’allais soit accoucher dans les prochaines 48 heures, ou bien pas avant plusieurs semaines. Ce ne fut finalement pas avant 3 semaines. J’ai donc été alitée pendant des semaines là-bas, à ne pouvoir voir personne sauf mon homme, et une chance qu’il était là ! Je me levais pour aller faire pipi et me laver. Une chance que je suis de nature résiliente, parce que j’ai dû faire mon deuil de mes photos de grossesse, de mon shower et de plein d’autres choses. Rendu là, je m’en foutais royalement, tant que Léo restait au chaud le plus longtemps possible et qu’il était en santé. 


31 semaines de grossesse, après plus de 30 heures de contractions, Léo était parmi nous. Une belle grande échalote de 3,5 livres, en santé ; c’est tout ce qui nous importait. Pressé, le p’tit bonhomme, mais comme nous étions comblés de bonheur ! Un périple de 45 jours en néonatalogie nous attendait, où j’ai passé 45 JOURS sur la route, entre Saint-Urbain et Rosemont, 90 allers-retours, des journées entières à utiliser la méthode kangourou, à cajoler mon bébé. Honnêtement, je ne voyais pas le temps passer, et lorsque l’heure du départ arrivait, mon cœur se serrait parce que je me sentais tellement comme une mauvaise mère de laisser mon Léo tout seul… Mais, ce n’est pas vrai, il n’était pas seul, car il avait des infirmières incroyables pour s’occuper de lui, douces et maternelles. Je savais qu’il était entre de bonnes mains. Mon chum, lui, après avoir travaillé à l’autre bout de la ville toute la journée, venait faire du « peau à peau » avec son petit bonhomme pendant quelques heures, presque tous les jours. J’ai oublié de mentionner que c’était pendant la COVID, et que nous ne pouvions jamais être les deux à nous occuper de notre bébé en même temps. Imaginez-vous cette situation où vous ne pouvez pas ramener votre enfant à la maison avant 45 jours, mais qu’en plus, vous ne pouvez pas le regarder et le contempler en famille : ça fait mal. Entre-temps, il fallait s’occuper de notre chez-nous, mais c’était le dernier de nos soucis (merci maman pour ces innombrables plats de bouffe, une chance que tu étais là). Comme vous vous en doutez, allaiter un bébé de 31 semaines, c’est impossible (le réflexe de succion n’est pas encore acquis), j’ai donc dû tirer mon lait aux 2-3 heures, jour et nuit, à coup de deux tire-laits installés à côté de mon lit, avec comme voisin le cooler afin de réfrigérer mon lait tiré, question que je puisse dormir un peu. Le beau, là-dedans, c’est que j’étais une grande productrice de lait, une TRÈS grande productrice ! Mon congélateur est encore plein (vous comprendrez plus loin pourquoi je ne l’ai pas encore tout passé). Au bout du compte, mon petit préma a pu recevoir, dès sa naissance, les meilleurs nutriments pour son développement, et c’est tout ce qui importait. 


Léo nous a prouvé qu’il était un champion, un vrai superhéros. On n’en revenait pas comme il était fort, fort comme son papa.


Et puis, après quelques semaines, j’ai pu commencer à réaliser mon rêve, celui d’allaiter. Ça s’est fait, tranquillement, tout doucement. De jour en jour, il s’endurcissait, tétait plus longtemps. Il faut savoir que c’est bien fatigant téter, surtout pour un petit bébé comme ça ! Quand il a été capable de téter trois fois par jour (les autres boires étaient donnés au biberon contenant mon lait), on a pu rentrer à la maison. Enfin, nous nous retrouvions juste nous trois. Le pur bonheur, finalement ! L’allaitement était facile, tout était merveilleux. 


Lorsque Léo avait autour de 3-4 mois, les boires étaient devenus plus difficiles. Léo avait de grosses diarrhées et des maux de ventre, ses dodos étaient épouvantables, et j’en passe. Tout était trop parfait, voilà qu’il était intolérant aux protéines bovines, aux produits de lait de vache, et, aussi, au soya. Mon rêve d’allaiter semblait s’écrouler. J’ai trouvé le régime d’éviction très difficile au début. J’ai perdu du poids, je ne savais plus quoi manger, j’étais un peu découragée. J’ai finalement décidé de me retrousser les manches et de me rappeler comment je suis une femme résiliente. Puis, tout s’est placé un peu, tranquillement, en reculant parfois, et en pensant souvent qu’il y avait autre chose, d’autres aliments qui dérangeaient. J’ai donc coupé un autre aliment, puis un autre, sans savoir s’il s’agissait de ce que je devais faire. Je suis allée voir une ostéopathe, une chiropraticienne qui pratique la kinésiologie appliquée, etc. Puis, un jour, on a commencé à le faire manger, des céréales de bébé. ERREUR. On a arrêté. On a essayé des légumes sucrés en purée, c’était mieux. Plus le temps avançait, mieux c’était, heureusement. Lorsque ses 8 mois sont arrivés, son pédiatre nous a donc élaboré un plan de match pour réintroduire ce qui dérangeait ses inconforts 5-6 mois auparavant. J’avais peur, peur que tout s’écroule et qu’on doive recommencer tout à zéro. Alors on y est allé très graduellement, on a réintroduit le bœuf pendant quelque temps, ensuite, le soya et, finalement, la grosse bête noire : les produits laitiers. Chaque fois que je le nourrissais, j’avais peur du « après », de la façon dont il réagirait. Et bien, croyez-le ou non, tout a disparu. Plus de maux de ventre, plus de douleurs, plus d’inconforts : mon bébé était enfin guéri. Une fois de plus, Léo nous prouvait qu’il était un champion, notre Big boy. Ah, et j’ai pu enfin manger une bonne poutine, après 8 mois d’attente ; elle était bonne en taaaaa !


J’allaite toujours mon bébé d’amour qui a 1 an aujourd’hui (ben oui, le 5 avril). Même s’il me mord les tits parfois avec ses 8 dents, ce n’est pas grave. Le temps passe si vite, il faut profiter de chaque seconde de doux, de colle-colle, d’yeux dans les yeux. 


Faites confiance à la vie, ça vaut la peine.